Coe Exploite le Changement de Direction du CIO pour le Cross-Country d'Hiver
Sebastian Coe navigue un moment charnière dans la politique olympique, utilisant des relations améliorées avec le Comité International Olympique pour faire avancer une proposition qui pourrait fondamentalement altérer le profil géographique et démographique des Jeux d'hiver. Le président de World Athletics fait une poussée concertée pour que le cross-country soit inclus soit aux Jeux Olympiques d'hiver de 2030 dans les Alpes françaises, soit aux Jeux de 2034 à Salt Lake City, encadrant l'initiative à la fois comme un retour à la tradition olympique et comme une étape nécessaire vers une plus grande inclusivité mondiale.
Le moment de la campagne reflète un calcul politique prudent. L'ascension récente de Kirsty Coventry à la présidence du CIO a, selon Coe, créé une ouverture sans précédent à la réforme structurelle au sein du mouvement olympique. Dans une interview avec l'Associated Press menée lors de sa visite à New York pour le marathon de la ville, Coe a caractérisé la nouvelle dynamique de leadership en termes remarquablement positifs. "La nouvelle présidente est claire qu'elle veut tout mettre sur la table en ce moment," a-t-il observé. "C'est une atmosphère très différente. C'est plutôt comment pouvons-nous améliorer ensemble plutôt que nous vous dirons comment le faire. Elle a insufflé de l'oxygène dans l'organisation."
Ce langage diplomatique masque ce qui a historiquement été une relation parfois contentieuse entre les fédérations sportives internationales et le CIO. L'enthousiasme de Coe pour l'approche collaborative de Coventry suggère qu'il perçoit un véritable changement par rapport au style de gouvernance plus descendant qui a parfois caractérisé l'administration olympique. Pour Coe, qui a longtemps plaidé pour l'inclusion olympique du cross-country, cela représente une ouverture potentiellement décisive.
La proposition aborde ce que Coe considère comme une inéquité inhérente dans la structure actuelle des Jeux d'hiver. Les sports olympiques d'hiver ont traditionnellement privilégié les nations avec des avantages géographiques et économiques spécifiques : climats froids, terrain montagneux, et l'investissement infrastructurel substantiel requis pour des sports comme le ski, le bobsleigh et le hockey sur glace. Cela concentre naturellement le succès olympique d'hiver parmi un groupe relativement restreint de nations principalement riches de l'hémisphère nord. Le continent africain tout entier, malgré sa population de plus de 1,4 milliard de personnes, reste largement exclu d'une participation significative aux Jeux d'hiver.
Pourtant, les athlètes africains ont démontré une excellence extraordinaire dans les épreuves de course de fond aux Jeux Olympiques d'été, dominant constamment les courses de moyenne et longue distance. Cela suggère que dans les disciplines nécessitant principalement une endurance aérobie plutôt que des installations spécialisées de sports d'hiver, les nations africaines pourraient concourir au plus haut niveau. Le cross-country, qui exige exactement ces qualités tout en étant entièrement réalisable dans des conditions hivernales, représente un sport-pont idéal.
Coe a fait cet argument explicitement, bien que quelque peu maladroitement. "Les Jeux d'hiver ne sont pas africains. Ça ne crie pas africain," a-t-il dit. "Donc je pense que c'était une bonne opportunité." Le commentaire reflète une reconnaissance pragmatique des réalités actuelles tout en proposant un mécanisme de changement. En introduisant un sport où les athlètes africains possèdent déjà des capacités de niveau mondial, les Jeux Olympiques d'hiver pourraient véritablement devenir un événement plus représentatif mondialement plutôt que de rester l'apanage d'un groupe restreint de nations.
Le précédent historique du cross-country olympique renforce le cas de Coe. Le sport faisait en effet partie du programme olympique de 1912 à 1924, apparaissant exclusivement aux Jeux d'été. Son retrait a suivi les infâmes Jeux Olympiques de Paris de 1924, où une chaleur extrême combinée à un parcours punitif a produit des scènes de détresse grave parmi les concurrents. Les comptes contemporains décrivent des coureurs s'effondrant d'épuisement dû à la chaleur, plusieurs nécessitant une intervention médicale. Préoccupés par le bien-être des athlètes, les organisateurs olympiques ont complètement abandonné l'événement.
Cette histoire, plutôt que de miner la proposition actuelle, la soutient en fait. Le problème fondamental avec le cross-country olympique était environnemental, pas intrinsèque au sport lui-même. Disputé dans des conditions hivernales, ces préoccupations seraient atténuées sinon entièrement éliminées. La proposition de Coe représente ainsi non pas l'innovation mais la restauration, réintroduisant un sport olympique authentique dans des conditions beaucoup plus appropriées pour sa conduite sûre.
La mise en œuvre nécessiterait un amendement de la Charte olympique, bien que Coe caractérise cela comme relativement simple. La révision établirait que les sports pratiqués pendant les mois d'hiver sont éligibles pour l'inclusion aux Jeux d'hiver. Bien que tout amendement de la Charte implique une complexité procédurale, la position de Coe dans le nouveau groupe de travail du programme olympique du CIO lui fournit une influence significative sur précisément ces questions. Le groupe de travail a été chargé d'examiner des aspects fondamentaux de la structure olympique : la taille des Jeux, les mécanismes pour ajouter ou retirer des sports, et si la distinction tranchée traditionnelle entre les sports olympiques d'été et d'hiver devrait persister dans sa forme actuelle.
Cette position institutionnelle donne à Coe plus qu'une simple plateforme de plaidoyer. En tant que membre du groupe de travail, il participe directement au processus délibératif qui façonnera les recommandations au CIO complet. Sa proposition pour le cross-country peut ainsi être intégrée dans des discussions plus larges sur l'évolution olympique et l'inclusivité, potentiellement gagnant de l'élan comme partie d'un paquet de réformes plus large plutôt que de se présenter comme une demande isolée d'une seule fédération.
Au-delà de l'expansion des sports d'hiver, Coe a discuté de plusieurs autres initiatives athlétiques. L'athlétisme se déplacera à la semaine d'ouverture des Jeux Olympiques de Los Angeles 2028, un changement d'horaire que Coe soutient fortement. Son enthousiasme pour Los Angeles est en partie nostalgique ; il a gagné la médaille d'or du 1 500 mètres aux Jeux de 1984 là-bas, établissant un record olympique. Mais il crédite également ces Jeux, organisés par Peter Ueberroth, d'avoir été pionniers dans l'économie olympique moderne à travers des approches innovantes aux droits de diffusion, parrainages et durabilité des sites.
World Athletics poursuit simultanément l'innovation de format. L'organisation a annoncé RUN X, un championnat du monde de tapis roulant avec des courses qualificatives de 5 km culminant dans une finale de championnat fin de l'année prochaine. Plus significativement, l'Ultimate Championships débutera à Budapest du 11 au 13 septembre, condensant la compétition de classe mondiale en trois sessions en soirée explicitement conçues pour la télévision. Coe a été caractéristiquement direct sur le but du format : "C'est un championnat du monde en trois jours, trois heures par soir, sans vergogne visant la télévision."
Ces diverses initiatives révèlent la philosophie de gouvernance de Coe : l'athlétisme doit évoluer pour rester pertinent dans un paysage de divertissement sportif de plus en plus compétitif tout en élargissant simultanément sa portée géographique et en approfondissant sa base de participants mondiale. La proposition de cross-country incarne les deux impératifs, offrant un chemin pour que les Jeux Olympiques d'hiver deviennent véritablement mondiaux tout en ravivant un événement avec un héritage olympique authentique.
Que la proposition de Coe réussisse reste incertain, dépendant de la politique interne complexe du CIO et de la réceptivité des parties prenantes des Jeux Olympiques d'hiver. Mais son timing stratégique, son positionnement institutionnel et la logique inhérente de son argument d'inclusivité suggèrent que cela peut représenter l'opportunité la plus sérieuse pour une réforme structurelle des Jeux d'hiver depuis des décennies.